Hier au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, s’est donc tenu un débat au sujet du rapport sur la « pauvreté infantile » présenté par la députée socialiste Christiane Vienne. J’y suis intervenue pour mon groupe, pour y défendre les idées suivantes.
Ce n’est pas le premier rapport sur le sujet. Personne ne peut donc être surpris par les constats accablants qui y sont dressés. Le Délégué aux droits de l’enfant avait déjà présenté au Parlement un rapport analogue dès 2009 et le rapport montre que la situation a empiré depuis.
Le Parti socialiste en choisissant de mettre en avant cette thématique veut montrer qu’il s’agit d’une priorité. Mais il prend aussi le risque de prendre en effet boomerang la réplique que ce même parti est à la manœuvre depuis des années pratiquement à tous les niveaux de pouvoir où il pouvait agir. Mon coeur a donc saigné de devoir rappeler l’impact des mesures d’exclusion du chômage mises en place par le Gouvernement Di Rupo et amplifiées par le gouvernement Michel, mesures qui ont un impact direct sur la pauvreté infantile, notamment. Sans remise en question de ce type de politiques, on risque de se retrouver à analyser des rapports qui vont dans le même sens pendant des années encore.
Dans la catégorie des mesures conduisant à la pauvreté, il y a aussi évidemment le logement: comment une mère seule qui doit consacrer plus de 50%, voire 60% de ses revenus rien que pour payer son loyer, sans parler des charges, peut assumer des dépenses scolaires, extrascolaires ou culturelles pour ses enfants ? Quelle est la politique de logement menée aujourd’hui à Bruxelles et en Wallonie ?
Pour en revenir aux compétences directes de la Fédération Wallonie-Bruxelles, ECOLO veut prendre au mot le parti socialiste et s’engage à soutenir toute proposition CONCRETE qui soutiendra les six priorités suivantes :
1. Notre système scolaire est particulièrement inéquitable, dès l’enseignement fondamental. Le rapport en fait le constat. Dans notre Fédération, 97 % des enfants sont inscrits à l’école maternelle, ce qui est énorme. Mais cela n’empêche pas qu’un élève sur cinq est en retard à l’issue de l’enseignement primaire. Ce qui est tout aussi énorme. N’est-il pas temps, avant même d’abaisser l’âge de l’obligation scolaire, de réinvestir massivement dans l’enseignement maternel ? C’est le niveau le plus important mais c’est là que l’encadrement est le plus faible. N’est-il pas urgent d’outiller les futurs enseignants pour aborder la réalité de la pauvreté et donner à chaque enfant des chances égales d’épanouissement ? Un système scolaire qui abandonne dès le plus jeune âge une frange entière des enfants ne pourra jamais prétendre à l’excellence.
2. Le PS plaide pour la réelle gratuité de l’enseignement. Nous sommes parfaitement d’accord. Ecolo déposera d’ailleurs un texte qui devrait permettre de débloquer le dossier.
3. La gratuité des cantines scolaires. Le président du PS l’a promise pendant la campagne électorale. On nous affirme aujourd’hui que les moyens existent. Le PS préside ce gouvernement. Alors, allons-y.
4. Le PS fait le constat très juste que l’accueil de la petite enfance a un impact plus positif encore sur les enfants défavorisés que sur le reste de la population. Et d’appeler à réformer l’ONE et le plan Cigogne pour renforcer le droit à l’accueil et rétablir une réelle égalité des chances. A nouveau: allez-y Madame Vienne! Si il s’agit d’augmenter le nombre, la variété et l’accessibilité des places, nous suivrons.
5. Le rapport propose de limiter drastiquement le redoublement. En effet, il augmente le risque de décrochage, il stigmatise les élèves et puis il coûte très cher à la collectivité. ECOLO suit sur le principe. Mais faisons les choses sérieusement, et pas, comme par le passé, en décrétant d’en-haut l’interdiction du redoublement pour se donner bonne conscience. Pour être effective, cette mesure doit passer par le tronc commun, donc par l’introduction de différentes disciplines dans le fondamental et au début du secondaire ET par le fait de former les enseignants à la gestion de l’hétérogénéité. Ce dernier point est entre les mains du ministre PS de l’Enseignement supérieur…
6. Enfin, le rapport n’aborde pas un autre phénomène inquiétant : les exclusions scolaires. Ecolo charge donc un rien la barque. Cette problématique là aussi est du ressort de notre Fédération, et donc de la majorité. Rien n’est plus compromettant pour l’avenir d’un élève que d’être exclu de l’école. Il faut donc prendre ce problème à bras le corps, plutôt que ce se contenter d’en faire le constat.
Pour conclure, tout le rapport évite de poser la question des moyens. On ne peut pas prétendre que l’on veut faire d’une thématique une priorité et éviter d’aborder la question des moyens pour concrétiser cet objectif. Depuis le début de la législature ECOLO encourage le gouvernement de la Fédération à revoir son carcan budgétaire, mais la majorité PS-CDH refuse jusqu’à présent de porter ce combat.
Bref, des leviers importants sont dans les mains de la majorité au gouvernement de la Fédération Wallonie-Bruxelles, que le PS préside. Qu’il les actionne, il en a le pouvoir et même le devoir. Mais si ce rapport devait rester lettre morte, s’il devait venir alourdir la pile des rapports aussi désespérants que poussiéreux, ce serait alors au PS de rougir de honte.